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Il n’est pas rare que les conciliateurs soient interpellés par des conciliants pour des problèmes d’indiscrétions de leurs voisins lorsque les propriétés sont contiguës. Ce peut être des élagages intempestifs de haies pour mieux surveiller ce qui se passe chez le voisin mais ce peut-être également des problèmes de vues et de jours.

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La vue est une ouverture pratiquée par un propriétaire dans une construction à partir de laquelle il peut plonger son regard sur la propriété
voisine.
Il en résulte que les règles édictées en matière de vues ne s’appliquent qu’entre des propriétés privées contigües.
Il n’y a pas de distances à respecter si l’ouverture donne sur la voie publique, sur un mur aveugle de la maison voisine, sur un toit fermé (sans
vasistas ni chien assis, sur le ciel en cas de vasistas en vue d’éclairer les combles.

 

La vue droite :

Le Code Civil prévoit dans ses articles 678 et 679 une distinction entre les vues droites et les vues obliques. Ainsi l’article 678 du Code Civil : On ne peut avoir des vues droites où fenêtres d’aspect, ni balcon ou autres semblables saillies sur l’héritage clos ou non clos de son voisin s’il n’y a dix-neuf décimètres (1,90m) de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s’exerce la vue ne soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d’une servitude de passage faisant obstacle à l’édification de
constructions.

La Cour d’Appel de Paris est venue préciser le texte dans un arrêt du 30 janvier 1990 en considérant « qu’une vue droite est une ouverture qui
permet de regarder sans effort particulier, de manière constante et normale, sur le fonds voisin ». En clair la vue droite permet de voir chez
le voisin sans ne se pencher ni tourner la tête.
Cette règle est valable pour les fenêtres, mais également pour une terrasse, un balcon, un escalier d’accès ou une échelle fixe extérieure, un
exhaussement de terre, une plate-forme.
Le calcul de la distance se fait à partir du parement extérieur de la façade lorsqu’il s’agit d’une fenêtre, ou de l’extrémité extérieure de la balustrade lorsqu’il s’agit d’un balcon ou d’une terrasse et ce jusqu’à la ligne de séparation des deux propriétés. (Cour d’Appel de Besançon 31 mars 1998).

 

Les vues obliques :

Les vues obliques sont celles qui permettent de voir la propriété voisine en tournant la tête soit à droite ou à gauche ou encore en se penchant.

Elles sont définies par l’article 679 du Code Civil.
« On ne peut, sous la même réserve, avoir des vues par côté ou obliques sur le même héritage, s’il n’y a six décimètres de distance. (0m60). »

Exceptions : un règlement de lotissement ou bien encore une servitude vue au profit d’un propriétaire, ou plus simplement encore une
acquisition par prescription. Ainsi une vue illégale acquise par prescription peut être opposable au propriétaire qui subit la vue. La Cour de Cassation décide de manière constante que le propriétaire du fonds devenu par prescription fonds dominant peut obtenir la démolition du bâtiment édifié sur le fonds servant dès lors que ce bâtiment ne respecte pas les distances imposées.

La sanction est donc très lourde pour le propriétaire qui a laissé passer les délais de prescription au profit de son voisin qui a édifié un jour ne respectant pas les distances légales mais qui est devenu un droit définitif suite à la prescription.

 

Convention pour servitude de vues

Les dispositions concernant les vues ne sont pas d’ordre public. Il est donc possible pour le conciliateur de rédiger une convention constituant une servitude de vue avec l’accord des conciliants.

Elle pourrait par exemple accepter, lorsqu’il s’agit d’une vue droite, une diminution de la hauteur d’une fenêtre à moins de 1,90m, ou lorsqu’il
s’agit d’une vue oblique la création d’une terrasse à moins de 0,60 m de la propriété voisine.

Par précaution, outre l’homologation, il ne sera pas inutile pour les conciliants de faire déposer aux minutes d’un notaire l’accord intervenu
afin qu’il soit déposé aux minutes de ce dernier aux fins de publication au registre foncier rendant opposable à quiconque l’accord intervenu.
A défaut, et sauf à démontrer la prescription trentenaire, l’accord pourrait être remis en cause par un nouvel acquéreur. Le conciliateur peut donc avoir un rôle important dans ce type de situation.

 

Les jours

Les jours sont des ouvertures qui ne laissent passer que la lumière. Ilssont dits « de souffrance ou de tolérance ». Ce sont des ouvertures qui
ne s’ouvrent pas et qui sont seulement destinées à laisser passer le jour sans laisser passer l’air et les regards. Ces ouvertures sont composées
d’un carré fixe et d’un verre dormant c’est à dire translucide mais non transparent, vitres qui ne laisse passer que la lumière mais non la vue.

Ils doivent être dotés d’un treillis de fer dont les mailles ont au maximum 10 cm d’ouverture. Ces ouvertures ne peuvent être aménagés que sur des murs privatifs ou avec l’autorisation des voisins lorsque ces derniers partagent la mitoyenneté. C’est ce qui résulte des articles 675 et 676 du Code Civil.

Article 675 : L’un des voisins ne peut, sans le consentement de l’autre, pratiquer dans le mur mitoyen aucune fenêtre ou ouverture, en quelque manière que ce soit, même à verre dormant.

Article 676 : Le propriétaire d’un mur non mitoyen, joignant immédiatement l’héritage d’autrui, peut pratiquer dans ce mur des jours
ou fenêtres à fer maillé et verre dormant
Ces fenêtres doivent être garnies d’un treillis de fer dont les mailles auront un décimètre (environ trois pouces huit lignes) d’ouverture au plus et d’un châssis à verre dormant.

Article 677 :  Ces fenêtres ou jours ne peuvent être établis qu’à vingt-six décimètres (huit pieds) au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu’on veut éclairer, si c’est à rez-de-chaussée, et à dix-neuf décimètres (six pieds) au-dessus du plancher pour les étages supérieurs.

Pour le conciliateur il est important de retenir que les jours ne sont que de simples tolérances. Ils ne peuvent contrairement aux vues engendrer une servitude imposant une distance de recul ni même revendiquer une prescription trentenaire.

 

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