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Quelques précisions sur cette sujétion de voisinage qui interdit que les eaux pluviales provenant d’un bâti ne se déversent sur le fonds du voisin.

 

Running Away From Rain.

La servitude de voisinage dite de « l’égout des toits » relève de deux dispositions du code civil : les servitudes dérivant de la situation des lieux et celles établies par la loi. L’article 640 dispose que « les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l’homme y ait contribué » et l’article 681 précise que « tout propriétaire doit établir des toits de manière que les eaux pluviales s’écoulent sur son terrain ou sur la voie publique. Il ne peut les faire verser sur le fonds de son voisin ». Le principe est donc que tout propriétaire d’un bâtiment, évidemment construit par la main de l’homme, ne peut aggraver la servitude naturelle relevant de la situation des terrains.

Il est imposé une charge au fonds supérieur pour l’aménagement du déversement des eaux provenant de son toit : il a le choix entre faire écouler ces eaux sur son propre terrain ou es faire déverser sur la voie publique si l’aménagement des lieux le permet. Il s’agit non seulement du déversement direct mais également des ruissellements pouvant provoquer des dégradations à la construction
voisine, qu’ils soient en pluie ou par gouttières. Les toits doivent être construits de telle façon que les eaux pluviales ne s’écoulent pas chez le voisin. Sont ainsi prohibées les saillies, non seulement des toits mais aussi des chenaux et gouttières sur la propriété voisine. Il peut être établi sur le terrain du propriétaire du toit un espace pour recevoir les eaux qui, selon les règles de construction, est fixé au double de l’avancement du toit ou à trois pieds, et peut constituer un canal d’arrosage à ciel ouvert.
Les aménagements faits pour l’écoulement des eaux ne doivent pas être préjudiciables au voisin qui ne doit supporter que l’écoulement naturel des eaux du terrain : cette servitude ne peut être aggravée par des travaux ayant accru le débord du toit ou par des défauts d’entretien persistants. La jurisprudence précise ainsi qu’un propriétaire ne peut s’opposer à la demande de son voisin de réparer sa gouttière tordue qui déverse les eaux pluviales sur la propriété du voisin.

 

Ne pas aggraver la servitude naturelle liée à la topographie

En cas de dommage constaté sur le mur du voisin, ayant pour cause directe et certaine un défaut d’entretien persistant du hangar le jouxtant, le propriétaire du fonds sur lequel est édifié le hangar incriminé est responsable des dégradations occasionnées par l’écoulement des eaux pluviales du toit du hangar dépourvu de gouttière.

Les eaux pluviales d’un toit sans gouttière endommageant la maçonnerie du mur d’un fonds voisin, le propriétaire aurait dû et doit prendre toutes mesures utiles. De surcroît, il doit supporter le coût de la réparation du mur.

En revanche, les eaux pluviales provenant du toit d’un immeuble s’écoulant sur le fonds du propriétaire de celui-ci peuvent s’écouler ensuite sur le fonds voisin situé plus bas.

Il est considéré que la servitude naturelle d’écoulement des eaux liée à la topographie des lieux n’est pas aggravée par la construction sur le fonds supérieur d’un bâtiment comportant un toit. Toutefois, il est impératif qu’il n’y ait aucune modification de la pente naturelle du terrain. Cela constituerait une aggravation, prohibée, de la servitude. Tout aménagement concernant l’écoulement des eaux sur le terrain supérieur ne devant pas être préjudiciable au voisin, il en résulte que toute construction portant atteinte à la servitude légale est sanctionnée par sa démolition ou par son déplacement.

Dans certains cas, un aménagement peut être envisagé, tel un puisard. Le toit, les gouttières et les chenaux ne devant pas faire saillie sur la propriété voisine, les constructeurs doivent vérifier si le propriétaire du bâtiment, à construire ou à réhabiliter, est bien propriétaire de la bande de terrain, sous la saillie du toit, sur laquelle se déversent les eaux pluviales. La présomption simple de cette propriété, dont le voisin peut apporter la preuve contraire, est aujourd’hui affaiblie par la jurisprudence : elle considère que
celui qui revendique la propriété de cette bande de terrain doit le prouver. Il ne peut s’appuyer sur le principe que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous qui ne joue que dans le sens du sol vers le ciel et non de la toiture vers le sol. Les juges du
fonds apprécient souverainement cette propriété en prenant en considération la situation des lieux et les éléments de fait en l’absence de titre.

 

Une prescription trentenaire

Il est possible d’acquérir une servitude de déversement, c’est-à-dire le droit d’écouler l’eau des toits sur le terrain voisin, dans les conditions prévues par l’article 690 du code civil : « Les servitudes continues et apparentes s’acquièrent par titre ou par la possession de trente ans ». La convention écrite doit préciser sans ambiguïté les caractéristiques de ce déversement et comporter la description précise du toit, de son surplomb, éventuellement de ses chenaux et gouttières. Il est important que ce document soit remis aux constructeurs par le maître d’ouvrage qui doit leur transmettre toute information sur son terrain et la construction existante.

Concernant la prescription trentenaire, la preuve doit être faite que l’usage de cette servitude est continue et bien apparente par des
ouvrages extérieurs ou la disposition des lieux, tel un débord de toit. Ce dernier atteste que ce toit existe depuis plus de trente ans et que ses eaux se sont écoulées pendant tout cette période sur le fonds voisin, sans l’intervention de l’homme.

Il appartient à l’architecte de vérifier ces éléments, de s’informer utilement à cet égard et de conseiller le maître d’ouvrage. Des preuves descriptives, photographies ou autres, de la continuité trentenaire sont utiles. Cette servitude ne peut concerner que les eaux pluviales : ni eaux ménagères, ni eaux usées. Le propriétaire du fonds servant ne peut en gêner l’exercice par des constructions nouvelles sur son terrain. De son côté, le bénéficiaire ne peut aggraver cette servitude en procédant à des travaux augmentant, par exemple la saillie du toit. Il peut toutefois procéder à des aménagements de son toit qui seraient une amélioration de la situation existante telle qu’une installation de chenaux et de descentes d’eau. Dans ce cas, il est conseillé de prévenir le voisin avant tous travaux, en lui transmettant le descriptif attestant de la non-aggravation de la servitude.

Il peut également exister une servitude « par destination de père de famille » relevant des articles 692 et 693 du code civil, attestant que les deux fonds voisins ont appartenu au même propriétaire et que la servitude résulte des aménagements qu’il
a établis. Mais ne peuvent relever de cette servitude les constructions et installations postérieures à l’acte de partage.

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